Jadis, les gens s’étonnaient devant la vision d’une dépouille. Aujourd’hui, plus d’émotion n’est visible! Nada. Les individus semblent être plus surpris de vous voir en vie que morts. Cette scène est encore plus déroutante! On annonce la nouvelle du décès d’un proche et l’autre interlocuteur lâche comme réponse : « c’est vrai ? Non, c’est une blague ! » . Ensuite vient un silence suivi d’un « humm, le pauvre ! ». Quelques secondes après, tranquillement la personne informe l’autre qu’elle est occupée ! C’est l’heure d’un match de football, la finale de la ligue des champions, par exemple, un événement très important qu’elle ne peut se permettre de rater! Ou, elle appelle un proche pour savoir si son feuilleton télévisé a déjà débuté. Celui qui est mort “paix à son âme” et hasta la vista Baby.

Nous vivons chaque jour des scènes semblables à celle-ci. Nathalie une élève d’une école publique qui fait la queue devant une marchande de friture. Elle voit un professeur traverser la rue pour franchir la porte de l’établissement où il dispense ses cours. Elle se contente de lui faire signe de la main et lui balance « Ou la toujou! Saw vinn fé la? Mwen konnen u mouri wi mwen sa fè dè jou yo pa wè w lekòl la ! (Tu es encore de ce monde! Qu’est-ce que tu es venu faire ici ? J’ai cru que tu étais mort, ca fait des jours que tu n’es pas venu à l’école ».
Peut-on se permettre de tenir un tel discours quand on a conscience que la vie de son prochain est précieuse ? On se permet de jouer avec la vie dans ce pays comme si elle n’avait pas d’importance. Les haïtiens sont comme immunisé par la mort, et ceci depuis le drame du 12 janvier 2010, un tel drame ne peut que traumatiser même les plus forts d’entre nous
Voici la goutte d’eau qui vient déborder le vase! Le drame de la femme qui a tué son mari et a placé son cadavre au fond d’un bac cylindrique plastique aurait dû émouvoir et susciter des débats ! Mais non, cette histoire est devenue un sujet d’amusement ! Les individus préfèrent transformer cette tragédie en une blague, cela se passe tant dans nos rues que sur les réseaux sociaux. Comme illustration, prenons les commentaires recueillis rien qu’à la vue de cet objet que nous utilisons pourtant dans notre vie courante. Un passant remarque un de ces fameux bacs en vente, il se marre en criant en direction de la marchande « Tu ne crains pas que la police t’arrêtes ? Tu veux y placer la vendeuse qui est à tes côtés ? » A une potentielle acheteuse de rétorquer « Moi je lui ai fait un e offre de deux mille gourdes pour le bac, je n’ai pas de mari à dépecer pour le mettre dedans. Je veux l’acheter uniquement pour stocker de l’eau».
L’éducation semble n’avoir pu prémunir contre ce mal. Une étudiante de la faculté des sciences économiques réprimande un garçon qui l’embête en le menaçant de le découper en petits morceaux pour les placer ensuite dans un bac.
La disparition tragique n’a pas vraiment touché la population, selon Pierre qui s’errige en défenseur du feu mari de la dame désigné par le trsite pseudonyme « fanm doum nan » (la femme au bac cylindrique en plastique) en souvenir du sort qu’elle a infligé à l’homme qui partageait son lit. De son point de vue, si c’était un homme qui avait commis ce crime il y aurait plus de scandale. Vu que c’est une femme alors c’est normal, une simple revanche pour les mauvais comportements des machistes coureurs de jupon.
Voilà, l’état psychologique des haïtiens ! Il est peut être due a la peur qui sait ? Il fut un temps où les gens se soutenaient pour défendre des inconnus dans la rue quand ils se faisaient attaquer, maintenant on se fait braquer et tuer dans la rue et les gens détournent leur regard comme pour dire: Tant que c’est pas moi ni un proche! I dont care!
Cinthia PAUL