Haïti | Éducation | Les finissants du secondaire, à la sortie du bordel!

A l’issue de la dernière journée d’épreuve d’État des examens comptant pour l’obtention du Bacc Unique (Bacc 2), des élèves ont gagné la rue pour s’exprimer, dans des danses tout aussi malsaines que les propos tenus en la circonstance. Ils ont injurié l’État, et ont craché leur velléité de traverser en République voisine en cas d’échec.

Haïti | Éducation | Les finissants du secondaire, à la sortie du bordel!

Hier, j’ai vu, mais sans trop vouloir y croire. J’ai vu cette séquence de vidéo sur les réseaux sociaux, et je n’y avais pas cru pour une raison. Une seule et unique raison. Pas parce que ce sont des élèves de philo (NS4), et je connais le niveau de dépravation qui ronge le substantiel de notre société trop permissive, dépourvue de garde-fou, de normes qui auraient permis que les choses se fassent avec manière, décence, et mesure. Ce qui pourrait au moins nous laisser entrevoir une lueur d’espoir, si infime qu’elle aurait pu être, mais espoir quand même, car d’une toute petite étincelle l’on peut tout espérer, feu de camp pour se réchauffer, brasier ardent pour consumer les impuretés qui nous engourdissent.

J’ai vu la vidéo, et je n’ai pas voulu y croire par simple préjugé, une certaine prétention débridée. J’ai vu des jeunes à fleur de l’âge, entre 18 et 21 ans, arborant leur uniforme de finissants du secondaire, déambuler les rues dans une trivialité si maintenue que j’ose douter qu’ils l’ont apprise à l’école, comme si l’on n’enseignait que ça de nos jours, alors que l’État fait semblant d’améliorer l’apprentissage au secondaire à travers le format Nouveau Secondaire implanté depuis sept ans environ.

Trente petites secondes de cette très courte vidéo ont suffi pour m’extirper de ma prétention, de mon utopie, par ce que ma mémoire a toujours retenu de cette communauté christophienne qui, jadis ne jurait que par l’élégance, le courage, la culture des valeurs, et l’excellence en tout, et partout. Tout était toujours prétexte pour se distinguer, s’exhiber d’une manière frôlant le m’as-tu-vu, pas par grotesque mépris pour les autres, mais c’était dans une certaine mesure, une façon de donner le ton, d’édicter les convenances auxquelles il faut adhérer.

C’était donc réel, même quand je n’y croyais pas, et encore je n’y crois pas d’ailleurs, nostalgie des belles années oblige, je suis un endurci de ces époques où «être élève» voulait dire plein de sublimes choses. Je me revois encore, environ vingt ans en arrière, aux Classes de Secondaire, avec toute la fougue de briller, d’être bon en quelque chose, de rivaliser des camarades de classe ou d’autres écoles: nous voulions toujours nous surpasser, inciter l’autre. On n’était pas des saints, que non, mais on n’était non plus pas si ornés de péchés, et l’on gardait certaine limite. En ces temps-là, les écoles ne pullulaient pas ci et là comme des bordels de fortune, à chaque coin de rue, la jeunesse était plus sérieuse, moins superficielle, plus portée sur l’avenir, et surtout connaissait l’emploi du substantif «gêne».

Au delà de ce que l’on a pu voir à travers cette vidéo, c’est un mal plus profond, plus sévère, qui risque de nous rayer. C’est une plaie sociétale, pluri-dimensionnelle, qui n’épargne personne, aucun secteur n’en est exempt, c’est une tumeur qui se développe avec une telle agressivité! Et c’est aussi l’expression abyssale d’un dégout exprimé nu et cru, sans langue de bois, avec le même niveau d’obscénité avec laquelle l’État traite les plus nécessiteux.

Au bout du compte, je comprends que le Cap-Haïtien, à défaut de ne rien bénéficier de la largesse et de l’opulence de la «République de Port-au-Prince» hérite des pratiques malsaines, des audacieuses insouciances des énergumènes de la Capitale.

Et quand la jeunesse atteint ce bas-fond, c’est l’avenir qui n’est plus!

Étienne De Saint-Exil etiennedesaintexil@gmail.com

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