Cavaillon : Plaidoyer pour un modèle d’habitat durable en réponse à l’approche humanitaire de l’abri provisoire après le séisme du 14 aout 2021 dans la péninsule du sud d’Haïti.

Cavaillon est parmi les communes les plus effondrées, à la suite du passage du séisme du 14 aout 2021 de magnitude de 7.2 sur l’échelle de Ritcher, dans la péninsule du sud. Les réponses ne sauraient se limiter à l’humanitaire selon la tradition dans les pratiques d’intervention. C’est l’effondrement d’un modèle d’aménagement du territoire qui a été constaté bien longtemps par Roumain, Moral, Barthélemy et Bastien sur la situation de l’habitat notamment en milieu rural. Des rebondissements de l’habitat précaire en milieu urbain se sont justifiées par la migration environnementale et la résultante de l’exclusion des populations rurales enclines à l’appauvrissement, assujetties aux taxes qui profitent aux prédateurs. Aussi quelques expériences de maisons construites après l’ouragan Matthew en 2016 ont témoigné de la nonchalance de certains opérateurs humanitaires avec le bémol par rapport aux constructions faites par l’ONG Haïti Mission à Bouffard (Camp Perrin), par exemple, qui ont su résister. L’initiative d’un comité d’appui à Cavaillon de quelques architectes et autres citoyens devrait interpeller les pouvoirs publics et les organisations internationales sur la nécessité d’investir dans la mise en place d’un modèle d’aménagement de territoire respectueux de la protection de l’environnement et du bien-être des populations.

Cavaillon : Plaidoyer pour un modèle d’habitat durable en réponse à l’approche humanitaire de l’abri provisoire après le séisme du 14 aout 2021 dans la péninsule du sud d’Haïti.

C’est l’effondrement d’un modèle d’aménagement du territoire dicté par une logique de rente. Ce, depuis la colonisation espagnole et consolidé de plus en plus. Les efforts dans le domaine de promotion de logement et de construction s’inscrivent dans un immédiatisme en dehors des normes. Les mairies dépourvues sont incapables de veiller au respect des normes de construction mais délivrent les autorisations au prix du clientélisme. Les défis technocratiques participent aussi dans le fonctionnement amateurisme qui dénie tout repère scientifique. Si de rares projets de logement restent encore de modèles telle la cité de delmas 3 (Sous le gouvernement de Paul Eugene Magloire), la très grande majorité s’inscrit dans le schéma d’habitat précaire.

Faudrait-il livrer la construction dans le secteur humanitaire ? Les sinistrés- si on peut les appeler ainsi sinon des victimes- ont besoin certes d’une aide d’urgence pour se reprendre de cette situation de choc mais l’aide durable est cruciale. C’est là, tout le défi des politiques publiques en matière d’aménagement du territoire et de construction d’habitat. Elie (2011) nous sensibilise sur l’aide des organisations internationales dans la construction et l’aménagement de camps après le 12 janvier 2010 qui s’écartent de standards établis pour ce qui concerne Haïti. Il s’agit de l’entretien d’un camp de sinistrés dans le périmètre lié à la protection de la source de Turgeau.

La situation de l’habitat précaire est préoccupante du point de vue structurel. Tous dégâts imminents à des risques environnementaux se justifient par rapport à la logique marchande dans la gestion de l’habitat tant rural qu’urbain. Le modèle d’aménagement de l’habitat est subordonné à des intérêts supranationaux. On assiste aussi à des cadres extrêmes de concentration ou la promiscuité dans les grandes villes par rapport à la dispersion voire l’isolement de l’habitat rural. Dans les deux cas, le mimétisme prévaut dans le mode d’aménagement et les constructions qui sont loin de garantir la sécurité physique sinon exhiber le prestige dans une perspective consumériste. Aussi le béton et le fer forgé deviennent-ils achalandés. Des risques sont imminents dans cette débandade en matière d’aménagement de territoire. Par exemple, la pollution de nos sources pour être limitrophes de constructions anarchiques et aux déversements des excrétas. Des incendies aussi incontournables avec de grandes difficultés d’évacuation avec la présence de bidonvilles ou de l’habitat précaire. L’établissement de constructions sur des pentes de plus de 30 degrés d’inclinaison sont monnaie courante, ce aux yeux des autorités locales qui délivrent les permis de constructions. On s’imagine ce qui pourrait se passer au morne l’Hôpital traversé par l’une des failles. L’axe Gressier, carrefour et Pétion Ville pourrait se convertir en hécatombe. On constate l’anticipation de la sociologue responsable de CIAT pour prendre des dispositions dans le cas des menaces de destructions du Cap Haïtien au passage d’un risque dont des études scientifiques ont déjà indiqué de cas de figure de l’ordre catastrophique. 

Il y a lieu de se passer des codes tels que maisons fissurées, endommagées, détruites.C’est l’effrondrement du modèle de l’habitat précaire inhérent à la logique de rente dans le cadre d’une longue manifestation de l’Etat prédateur en Haiti. 

Nous encourageons l’initiative d’un comité d’architectes en appui à Cavaillon qui voudrait s’inscrire dans le cadre d’un modèle d’habitat durable en lieu et place d’une conception humanitaire de l’habitat.Le doit au logement et le droit au travail ont caracterisé la question sociale soulevée déja depuis 1791 soit  57 ans avant la France (1848).D’ou la marche vers la reconquête de l’humanité en Haiti par rapport à la promotion de l’habitat qui tend à être érodée par la pratique de l’humanitaire. 

Hancy Pierre, professeur Travail social, Université d’Etat d’Haïti, 11 septembre 2021.


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