Un nouveau gouvernement, le pourrissement de la crise

Affaire classée ! L’international à travers le Core Group a tranché. Son ordre a été appliqué à la lettre! Dr Ariel Henry et les membres de son cabinet ministériel ont été investis de leurs fonctions. Ils devront rétablir la sécurité et organiser des élections générales. La crise qui pourtant a trop duré ne figure pas sur la liste de leurs priorités. Malheureusement !

Crédit Photo : Lapresse.ca
Un nouveau gouvernement, le pourrissement de la crise

On reprochait à Jovenel Moïse ses velléités dictatoriales. Son envie  d’établir un régime dictatorial en Haïti étaient évidentes pour certains. L’affaiblissement des institutions républicaines par la crise vieille de plusieurs décennies semblait l’arranger. Sa tendance pathologique à chercher à s’accommoder à la situation cahotique dérangeait plus d’un.

Aux premières lueurs du jour, Monsieur Jovenel Moïse avait déclaré constater la caducité du parlement. Un parlement comateux qui restera dans les annales de l’histoire. Nos futurs législateurs devront se surpasser pour battre le record d’improductivité établi par les élus de la 50e législature. Certains hommes d’État auraient décidé d’écourter leur mandat et d’organiser des élections générales, Monsieur Moïse ne faisait pas partie de cette catégorie là. Incapable de réaliser des élections, il a opté pour diriger par décret.  Et ça commence …

Le pouvoir judiciaire inféodé  à un  exécutif pourri jusqu’à la moelle dont sa seule volonté est de saper les acquis 《 démocratique 》 pour donner du champ libre aux vendus et corrompus notoires, se contentait d’observer les décisions les unes plus farfelues que les autres de celui qu’il avait blanchi plus tôt.

Le Président n’avait-il pas été déclaré avoir nommé une cinquantaine de juges corrompus dans un système qui ne jouit pas déjà dune bonne réputation? La justice avait d’autres chats à fouetter. La surpopulation carcérale était le cadet de ses soucis. Une crise de plus.

Monsieur Jovenel Moïse a été assassiné  7 mois avant la fin de son mandat ou 5 mois après l’expiration de ce dernier. Tout dépend de la lecture des uns et des autres et surtout de la version de la constitution qu’on veut appliquer. Certains puristes nous diront que la Constitution de 1987 est d’application puisque la version ratifiée (celle de Préval différente de celle qui a été votée par le Parlement ou celle de Martelly qui a corrigé les erreurs matérielles dans la première) ne respecte pas les prévisions constitutionnelles. C’est donc dans cette grande confusion que le Président Jovenel a été assassiné. Qui va assurer le respect du principe de la continuité de l’État? Aucun des prescrits constitutionnels n’était d’application.

Pas d’Assemblée Nationale, le dernier tiers du Sénat a fait profil bas. Le Président de la Cour de Cassation était décédé du Coronavirus. Des juges ont été envoyés en pension en toute violation de la loi consacrant leur inamovibilité.  La Primature quant à elle ne pouvait pas être plus utile. Ni le Premier ministre nommé ni le Premier Ministre a.i démissionnaire ne pouvaient en toute légitimité prendre les choses en main. Une seule option s’offrait donc : il fallait trouver un consensus ! Entre-temps la situation s’envenime.

L’insécurité, la prolifération des gangs armés qui chassaient les agents de la Police nationale d’Haïti des postes se trouvant sur leur territoire, l’insécurité alimentaire et tant d’autres faits permettaient de questionner la validité de notre modèle social. Il fallait donc réaliser ce que feu Turneb Delpé réclamait depuis des lustres : une conférence nationale.

Monsieur Jovenel Moïse avait pris diverses initiatives pour amener les filles et fils d’Haïti à se mettre ensemble pour décider un avenir meilleur. Aucune n’a été couronnée de succès. Toutefois ses détracteurs les plus acides, avec d’autres termes, reconnaissaient l’urgente nécessité de réaliser un franc dialogue inter-haïtien. Le vide laissé par son départ était donc une occasion inespérée pour amener les secteurs vitaux à dessiner ensemble le futur en commençant par mettre en place le gouvernement qui devra mener la dernière transition. Malheureusement, l’international a tranché ! Hélas ! Quel dommage !

Avec un simple communiqué, le Core Group (un regroupement de diverses missions diplomatiques en Haïti) a adoubé Ariel Henry et, en un temps record, ce dernier a pu remanier le cabinet ministériel. Claude Joseph qui s’agrippait au pouvoir s’est effacé et la queue entre les jambes est retourné à son poste de ministre des affaires étrangères, sans rechigner,  prétextant pour le bien de la République .

Ceux qui avaient pris des initiatives pour trouver une solution haïtienne à la crise généralisée qui menace de saper les fondements mêmes de notre société sont mis au rencart. Ariel Henry s’est donné deux mois pour renverser la vapeur en ce qui a trait au climat d’insécurité.  Il veut organiser des élections, mais n’a pas encore précisé avec quelle constitution et surtout pour qui?

Une fois de plus nous venons de rater une occasion en or de repartir sur de bonnes bases! La crise s’est détériorée, inutile d’attendre la prochaine vague de protestation populaire, l’inévitable crise électorale (pré ou post) ni les mouvements sociopolitiques pour en être sûr !

Avec ce nouveau gouvernement, une nouvelle crise se profile à l’horizon.

Annie FRANÇOIS


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